news
Alumni
18 March 2015

Vision de la Chine

C’est en représentant HRW au Forum Connexion qu’Emmanuelle Werner (MIR ’00) a rencontré Sébastien Gillioz (MIR ’03).

C’est en représentant Human Rights Watch au Forum Connexion qu’Emmanuelle Werner (MIR ’00) a rencontré Sébastien Gillioz (MIR ’03).

Directrice de Friends-International Suisse, Emmanuelle Werner Gillioz a travaillé dans le domaine de la protection de l'enfance au Guatemala. Elle a fait partie de l’équipe fondatrice du bureau de Human Rights Watch (HRW) à Genève et a piloté un programme visant à prévenir les abandons d’enfants et à développer des campagnes de sensibilisation auprès des touristes pour lutter contre le tourisme d’orphelinat pour Friends-International au Cambodge.

Passionnée de voyage, Emmanuelle livre dans «Au-delà des cerfs-volants» ses impressions de trois années vécues en Chine, au rythme d'anecdotes et d'événements marquants. Trois années fascinantes, éprouvantes, stimulantes. Cet ouvrage représente une invitation à découvrir Pékin depuis la fenêtre d'une femme, épouse et mère qui a découvert un monde complexe, contrasté et insolite, loin des préjugés. Elle nous raconte ici le début de l’histoire.

«Il y a cinq ans, Sébastien et moi avions mis le cap sur le Cambodge pour Human Rights Watch. Notre fils de sept mois sous un bras et notre chienne sous l’autre, nous atterrissions à Phnom Penh dans une nuit noire, les poches remplies de plumes destinées à l’écriture d’un nouveau chapitre de notre vie. Embrassés pas une chaleur moite et une simplicité toute khmère, nous avons retrouvé notre chienne sur le tapis roulant destiné aux valises.

Une année plus tard, j’étais au travail lorsque je reçus un message de Sébastien sur mon téléphone : «Est-ce que tu nous vois à Pékin ?». Ma réponse fut immédiate : «Non.» Il cherchait un emploi et l’Ambassade de Suisse à Pékin cherchait un conseiller en droits de l’Homme.

Vivre en Chine ne m’attirait pas. Je m’étais passionnée pour l’histoire de la République populaire sur les bancs de l’Institut, mais la Chine d’aujourd’hui me semblait trop étrangère. Le récit de cet ami qui commandait ses plats au restaurant sans avoir la moindre idée de ce qu’il allait manger m’avait marquée. J’avais le sentiment que la barrière de la langue devenait une barrière tout court.

À la lecture de l’annonce du poste proposé, ce fut pourtant une évidence : il semblait avoir été conçu pour Sébastien, taillé sur mesure. J’étais passionnée par mon travail mais mon seul salaire ne nous suffisait pas. Cette occasion représentait le tremplin qui allait nous emmener vers une inconnue que nous pressentions importante.

Une interview par téléphone devait avoir lieu avec Berne, et Sébastien cherchait un endroit dont la ligne garantirait une discussion d’une heure sans coupure. C’est dans le centre de conférence de l’hôtel Intercontinental, en short et sandales, qu’il écrivit la première ligne de notre chapitre chinois.

Trois ans se sont écoulés depuis ce coup de fil. Trois années fascinantes, marquantes, éprouvantes, stimulantes. Trois années vécues à Pékin.

L’idée de ce livre est née du besoin de documenter ce passage en terre chinoise, afin d’en laisser une trace à nos enfants. Ils ne garderont probablement de cette période que des empreintes sensorielles, et peut-être un goût prononcé pour les jiaozis à la betterave, les champignons noirs au vinaigre, les petits pains fourrés aux haricots rouges et le thé vert en bouteille.

Ces évocations représentent également une invitation à découvrir Pékin de la fenêtre d’une femme, épouse et mère qui n’avait pas prévu de se retrouver en Chine. En posant le pied sur le tarmac de l’aéroport, ce pays résonnait en moi avec censure, violation des droits de l’Homme et phénomènes de l’enfant-roi, autant de mets que nous servent les médias chez nous. J’ai découvert un monde bien plus complexe, polychrome, contrasté, insolite et fascinant. Au fil de ce récit qui traverse ces trois années au rythme d’anecdotes et d’événements marquants, les premières impressions font place à une compréhension plus fine de notre environnement.

On ne quitte pas la Chine comme on l’a rencontrée. Je souhaite au lecteur d’être bousculé, dérangé, de voir certaines idées préconçues s’émietter et d’avoir la chance d’élargir son champ de vision. Je souhaite au lecteur de passer par la Chine.»