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Alumni
01 November 2011

«Mon parcours est une richesse; il m’a appris l’adaptation»

L’Alumnus Toan Quan Ly, 42 ans, est webmaster et journaliste à la rubrique high-tech de L’Illustré.
 

Portraits d'étrangers en Suisse

Migration. Derrière ce mot imposant se cachent mille histoires, petites ou grandes, belles ou graves. Nécessité, envie ou simple hasard d’un parcours, l’exil ne fait pas l’exilé. Mais il y contribue. Portraits d’étrangers en Suisse.

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Quan Ly, 42 ans, est webmaster et journaliste à la rubrique high-tech de L’illustré. Marié et père de deux enfants, il était Français avant d’obtenir la nationalité suisse il y a deux ans. Son premier passage de frontière remonte à 1975: «Avec ma mère, ma grand-mère et mes trois frères, on a fui Saigon avant l’arrivée des Nord-Vietnamiens.»

Né à Vientiane, dans le Laos voisin, mais établi à Saigon, Quan et sa famille étaient du mauvais côté de la ligne dans un Vietnam qui vivait ses derniers jours de guerre avant la prise en main communiste. «Mon père, fonctionnaire catholique et francophile, a choisi de rester au pays. Il a ensuite tenté de fuir, mais a été rattrapé et placé en camp de rééducation...» Le durcissement progressif du régime s’accompagnera d’un exode massif – les fameuses images de boat people fuyant à bord d’embarcations de fortune. «La plupart ont émigré vers les Etats-Unis et la France.»

Ces souvenirs sont bien lointains. Quan Ly a grandi dans le pays de Gex dans une famille d’accueil française, sa mère tentant sa chance à Paris: «Quand on est petit, Paris, c’est loin de Saint-Genis-Pouilly... Ma mère me disait toujours de bien travailler à l’école.» Enfance sans histoires, cependant, ni souvenir d’aucun racisme. Au baccalauréat succède l’opportunité d’entrer en fac à Genève, à l’Institut des hautes études internationales. Quan y rencontre sa future épouse.

Après un doctorat à la Sorbonne, il s’oriente vers le journalisme: «A L’illustré, j’ai fait notamment des reportages sur les Roms, jusqu’en Roumanie pour suivre leur renvoi par bus. Le genre de sujets pour lesquels on ne se presse pas au portillon», s’amuse-t-il. Aujourd’hui, il a levé le pied et couvre l’actualité des nouvelles technologies. Il est retourné par deux fois au Vietnam, pays qui a bien changé «et suit le modèle chinois du capitalisme rouge. Quand on croise un 4x4, il y a de fortes chances qu’il soit conduit par un membre du Parti.» Là-bas, le journaliste a renoué contact avec son père, octogénaire: «J’aimerais lui présenter un jour ses petits-enfants, mais il se fait vieux...»

Son parcours lui inspire cette réflexion: «Je me sens reconnaissant envers la France et la Suisse. J’ai eu une chance que d’autres, aujourd’hui, n’ont pas. J’ai régulièrement entendu ce préjugé... positif: «Les Asiatiques sont bosseurs et fiables, comme les Suisses.» De quelle nationalité se sent-il? «Bonne question...» Il réfléchit. «Je me sens... humain. Mon parcours est une richesse; il m’a appris l’adaptation.» […]

De Roderic Mounir in Le Courrier, 8 octobre 2011

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