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Alumni
08 July 2013

La Suisse et les droits de l'homme

Giorgio Malinverni l’estime exemplaire dans son acceptation des condamnations dont elle fait l’objet à Strasbourg.

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Photo Alban Kakulya

Juge à la Cour européenne des droits de l’homme de 2006 à 2011, conseiller international auprès de la Cour constitutionnelle de Croatie de 1997 à 1999, membre suisse de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Conseil de l’Europe) dont il a assumé la vice-présidence de 1995 à 1997, Giorgio Malinverni est aujourd’hui président de l’association TRIAL (Track Impunity Always). 

Né en 1941, licencié en droit de l’Université de Fribourg en 1965 et titulaire d’un doctorat de l’Institut obtenu en 1973, Giorgio Malinverni a également mené une carrière académique. Professeur assistant dès 1974 et ordinaire dès 1980 à la Faculté de droit de l’Université de Genève, il a été professeur invité aux Universités de Lausanne (1982 et 1989), Neuchâtel (1991), Nice (1994), Paris II (1995) et Strasbourg (2000). Directeur du Département de droit constitutionnel (1983-1989 et 1995-1998) et président de la Section de droit public (1989-1993), Giorgio Malinverni a aussi été juriste auprès du CICR. Entretien.

La condamnation de la Suisse à Strasbourg pour l’expulsion d’un dealer nigérian a suscité une certaine incompréhension… Comprenez-vous cette réaction ?

Ces cas d’expulsion font aussi réagir dans des Etats comme le Royaume-Uni, la Suède ou les Pays-Bas, où des requérants d’asile déboutés restent de manière clandestine, se marient parfois, créent des liens familiaux, ont des enfants… et commettent des infractions. La Cour européenne doit trouver le juste équilibre entre le souci d’un Etat de se débarrasser de quelqu’un et le droit de cette personne à une vie familiale. Dans le cas mentionné, le plaignant avait divorcé mais gardé des liens étroits avec ses deux filles. Il était inconcevable qu’elles puissent lui rendre visite au Nigéria, et difficile pour lui de venir d’Afrique leur rendre visite. La Cour, à cinq juges contre deux, a estimé que dans la balance, le droit à la vie familiale l’emportait.

Ce jugement correspond-il à une tendance de la Cour européenne ?

La Cour a défini des critères à prendre en compte. La gravité des crimes commis, le temps passé dans le pays, les attaches avec le pays d’origine, si la famille de l’expulsé peut le suivre, etc. Malgré tout, la Cour est souvent divisée parce que tout dépend de l’importance que l’on donne à un facteur ou à un autre et que les juges ont des sensibilités différentes.

 

Suite de l’article écrit par Laurent Nicolet in Migros magazine, 3 juin 2013