Emmanuel Dalle Mulle (MEI en histoire et politique internationales, 2009) prépare sa thèse de doctorat sur le «Nationalisme des régions riches: discours et stratégies des partis séparatistes en Padanie, Catalogne, Ecosse et Flandres»
Le 18 septembre, les Ecossais ont confirmé leur participation pluriséculaire au Royaume-Uni. Les partisans de l’union ont salué la victoire du «no» avec un soupir de soulagement. La satisfaction prédomine aussi dans la plupart des pays européens, notamment ceux qui se confrontent à d’autres mouvements séparatistes, l’Espagne, la Belgique et, dans une moindre mesure, l’Italie. Mais les conséquences du vote écossais pourraient s’avérer beaucoup plus complexes que ce que ces applaudissements semblent suggérer.
Sur le plan interne, la question principale à laquelle le gouvernement britannique sera confronté dans les prochains mois concerne l’extension des pouvoirs du parlement écossais. Cette promesse fut plusieurs fois répétée pendant la campagne référendaire, de manière séparée ou conjointe, par les trois forces unionistes (conservateurs, travaillistes et libéraux-démocrates) et a été créditée comme l’un des facteurs décisifs pour assurer la défaite des indépendantistes. Un échec dans sa mise en oeuvre pourrait donc avoir de graves répercussions sur l’unité du pays.
Bien qu’ayant garanti des «nouveaux pouvoirs substantiels», les unionistes n’ont trouvé aucun accord sur les détails. La question tourne surtout autour des compétences fiscales, au sujet desquelles les offres sur la table diffèrent considérablement. Les conservateurs ont proposé la dévolution totale de l’impôt sur le revenu, en incluant la possibilité de changer les taux et les tranches d’imposition, ainsi que la dévolution de la taxe sur les passagers aériens. Ainsi, le parlement de Holyrood sera responsable de 40% de son budget, contre 7% actuellement. Le Parti travailliste a été plus prudent, limitant le pouvoir de variation de l’impôt sur le revenu à 15% et empêchant Holyrood de couper le taux le plus élevé pour éviter toute concurrence fiscale interne. A l’inverse, les libéraux-démocrates ont soutenu un ensemble très robuste de transferts, comprenant le contrôle total de l’impôt sur le revenu, les gains en capital, les successions et les passagers aériens, ainsi que des recettes fiscales des entreprises perçues dans la région.
Le calendrier dévoilé pendant la campagne prévoit l’ouverture immédiate des pourparlers. Un livre blanc devrait être publié entre octobre et novembre, suivi par la présentation d’un projet législatif à Westminster en janvier 2015. Au vu des différences entre les propositions sur la table, cette feuille de route semble excessivement optimiste.
Article complet, Le Temps, 24 septembre 2014