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Alumni
29 April 2016

Avec elle, prévenir le suicide

Irina Inostroza est active depuis cinq ans au sein de l’association Stop Suicide.

Après un stage à Ankara dans le cadre d’un programme pour la défense des droits humains à travers un médium artistique, Irina Inostroza (Master in International Relations, '07) reste en Turquie où elle participe activement à la mise sur pied d’un festival de films de femmes.

(…) Suivra un master en études genre qui confirme son intérêt pour l’évolution du monde et ses représentations: «J’ai étudié l’échographie pendant la grossesse. Je me suis intéressée à cette fascination visuelle qui nous pousse à voir ce qui n’est pas visible à l’oeil; j’ai aussi réfléchi sur comment ne pas se faire opprimer par la technologie.»

Habitée par la passion des gens

Mettre en mots savants le réel consolide ses connaissances personnelles, mais cela ne suffit pas quand on est habité comme Irina par la passion des gens. «J’avais envie de me confronter davantage encore à la réalité, de mettre ce que j’avais appris au service des autres», souligne-t-elle, avant d’ajouter en souriant: «J’ai à coeur de transmettre; mon dada, c’est le transfert des pratiques.» Convictions simples, doublées de qualités humaines qui ouvrent les portes de l’association Stop Suicide.

On lui confie à son arrivée en 2011 un poste qui n’existait pas. Le mandat est piégeux: il s’agit ni plus ni moins que de sensibiliser les journalistes à cette problématique difficile, en faisant le tour des rédactions, en assumant ce présupposé que les médias peuvent avoir – les exemples ne manquent pas – un effet pervers sur les conduites suicidaires. «On a mis en place un observatoire quotidien, en nous dotant d’un outil de veille professionnel. J’administre le tout: chaque jour à 10h, je lis les articles publiés en rapport avec la thématique; je sélectionne ceux qui méritent d’être discutés, au cas par cas j’adresse un courriel à leurs auteurs ou je demande à les rencontrer.»

Humilité et persuasion

L’observatrice avisée de nos dérives rédactionnelles, succombant parfois à la tentation du sensationnel et du dévoilement public, aux conséquences souvent ingérables dans le monde hyperconnecté qui est le nôtre, est parvenue peu à peu à se faire accepter dans son rôle délicat. Mieux: sa fine médiation, son expérience désormais reconnue lui valent en retour des sollicitations spontanées. On la consulte, on l’écoute, on aimerait bien, certains jours, faire le journal avec elle.

A ce mandat sensible s’en ajoute un autre, qui requiert également ce mélange d’humilité et de persuasion pour réussir à se faire entendre dans sa ville et ailleurs, jusqu’à Berne: la prévention du suicide par arme à feu, sur les ponts et les rails. Lourde tâche. Pour s’en alléger, la jeune femme, portant le prénom d’une célèbre patineuse artistique adorée de sa mère et le nom d’un père originaire du Chili, cultive deux passions qui se combinent: la marche et la méditation. «J’ai trouvé un équilibre, je suis plus apaisée dans mon travail.» Une douceur naturelle pleine de détermination. A l’image incarnée de l’association Stop Suicide.

Photographe: Georges Cabrera

 

Thierry Mertenat, Tribune de Genève, 27 avril 2016