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Climate
11 October 2019

Climat : pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?

En quelques mois, l’opinion publique a évolué. Un deuxième été étouffant, des cyclones dévastateurs, des glaciers qui régressent et l’incroyable mobilisation des jeunes; le message est désormais pris au sérieux. La prise de conscience est là, mais servira-t-elle à prendre les mesures nécessaires? On peut craindre que non. Le risque est grand que les bonnes intentions ne servent qu’à des évolutions plus cosmétiques et symboliques qu’efficaces.

Du côté de l’opinion publique, l’inquiétude amène naturellement chacun à vouloir faire quelque chose. Certains ne veulent plus utiliser l’avion ou deviennent végétariens, d’autres nous engagent à «changer de mode de vie» et prônent un nouvel ascétisme qui rejette les plaisirs de la vie moderne, remettant au goût du jour les vertus du bon sauvage. Du côté des gouvernements, la mode est aux engagements solennels à ne pas dépasser une augmentation de la température de plus de 1,5 ou 2°C ou à créer une économie zéro carbone en 2050. Bravo, mais comment?

Cela ressemble aux plans soviétiques qui annonçaient de merveilleux objectifs de production sans expliquer comment ils seraient atteints, et ils n’étaient pas atteints. Le politiquement correct vert s’est emparé des débats nationaux. Les citoyens angoissés et leurs gouvernements dressent des catalogues de mesures. Chacun a son ennemi préféré: les voitures et les avions, les pertes thermiques des appartements, le traitement des déchets, la disparition des forêts, le méthane produit par les vaches, etc. C’est une panoplie de mesures censées venir à bout des gaz à effet de serre qui sont proposées, sans vraiment poser la question de leur efficacité et de leur coût. Qui paiera et combien? Mystère.

Quand l’émotion, même si elle est compréhensible, remplace le raisonnement, l’erreur n’est jamais loin. Nous sommes abreuvés d’exemples des effets dangereux du réchauffement climatique. Nous découvrons la complexité des mécanismes qui se mettent en place, que ce soit la chaîne alimentaire (déclin rapide des espèces animales et végétales) ou l’évolution du climat et la montée des eaux.

C’est tout le système de la nature qui réagit, mobilisant les scientifiques dans plusieurs disciplines. Le foisonnement des symptômes encourage le flot des mesures. Mais la bonne stratégie est de s’attaquer aux causes, pas aux symptômes. Or, ce qui est extraordinaire dans ce cas, c’est que la cause est unique et simple: les émissions de carbone, plus précisément de CO2. En supprimant un seul phénomène, on traite tous les symptômes, d’un seul coup. Et ce qui est encore plus extraordinaire, c’est que c’est très facile de réduire drastiquement les émissions de CO2.

Pour cela, nous devons effectivement «changer la vie», tant ces émissions sont au coeur de tout ce que nous faisons quotidiennement. Il existe deux méthodes. L’une d’entre elles consister à réglementer, voire à interdire une multitude d’activités. C’est la méthode autoritaire, qui elle aussi rappelle l’approche soviétique. L’autre méthode, c’est celle des incitations. Il s’agit de décourager ces activités en les rendant onéreuses, très onéreuses. C’est tout bêtement la taxe carbone, qui frappe tout ce que nous consommons en proportion de son contenu en CO2. Comme on ne peut pas changer la vie d’un seul coup, il faut une taxe qui soit basse au départ mais qui augmente progressivement jusqu’à atteindre le zéro carbone.

Pourquoi donc cette solution, simple et à l’efficacité assurée, est-elle écartée? Parce qu’elle est efficace, la taxe carbone sonne le glas de quantité d’activités lucratives. Tous les lobbys le savent et font un travail de sape remarquablement influent. Ils s’appuient sur le fait que personne ne veut payer une taxe. Mais là encore, la solution est simple: il suffit de rendre aux citoyens ce qu’ils paient en taxe carbone. Simple, mais difficile à comprendre. Si on rend leur argent aux gens, la taxe ne sert plus à rien, n’est-ce pas? Pas du tout. Les produits carbonés deviendront de plus en plus chers.

A pouvoir d’achat inchangé grâce à la redistribution de la taxe, les gens choisiront de consommer de préférence des produits et des services non carbonés. Ils changeront leur mode de vie spontanément, parce qu’ils y auront intérêt. Pas besoin de traiter les symptômes et d’interdire quoi que ce soit.
 

Cet article a été publié dans Le Temps le 10 Octobre 2019.